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lundi 1 décembre 2014

La vie d'André : décembre 1914




Le départ de Pierre
Première lettre


Pierre est l’aîné de la famille : il est né en 1894, mais sa santé fragile a fait ajourner à un an son départ. Il est par conséquent de la classe 15 qui part en décembre.



Extraits des Archives en ligne de l'Yonne-répertoire alphabétique-


Il ne revêtira certainement pas le pantalon rouge et le képi des premiers soldats : la tenue "bleue horizon" est née.

"Fin décembre, arrivèrent les jeunes gens de la classe 15, appelés sous les drapeaux. C'est en chantant que ces recrues traversèrent la ville pour se rendre à la caserne"
(source : A chacun sa guerre-G. Daguin-SAS-Cerep)

Quelques jours auparavant les jeunes de cette classe 15 avaient reçu  ce courrier :








Comme André, Pierre est un adolescent fragile. Ci -dessous le portrait que fait de lui un ami d'André :

"... je le revois encore...avec sa physionomie si douce à laquelle une légère pâleur donnait une expression si sérieuse, avec ses yeux bleus, pleins de bonté et de franchise : comme il était calme à coté de notre exubérance qui nous empêchait de le comprendre ; c'est qu'il avait au cœur l'amour passionné de la science à laquelle il s'était donné tout entier..Toujours modeste, un peu renfermé, trop peut être, il était l'homme des études patientes et minutieuses comme celui des sacrifices obscurs..." (extrait d'une lettre d'André Gréhant envoyée à André).


Quelques jours avant Noël 1914, André et ses parents reçoivent la première correspondance militaire de Pierre, accompagnée d'une carte postale.









Pour Noël, Pierre recevra, certainement, comme tous les soldats la reproduction ci-dessous du dessin de M.Neumont



Noël aux armées
 Souscription des enfants de France à chacun 10 centimes


Désormais,  la guerre rythme le quotidien d'André,




à l'image de cette carte postale ou de cette copie qu'il a réalisée de l'estampe
d'E. Detaille de 1883 "En Vedette".









(Prochain article début janvier 2015)

-Le Conseil de Révision pour André-





dimanche 2 novembre 2014

La vie d'André : novembre 1914

Certainement profondément influencé par les écrits du poète Sylvio Pellico ("Discours à un jeune homme"),
                                                 








Extrait de l'ouvrage de Sylvio Pellico


"Des devoirs des hommes "


"Discours à un jeune homme"
                                
André recopie en première page de son carnet de poèmes, là où il peut laisser libre cours à l'expression de son "romantisme", le poème "Ode sur la mort de Sylvio".



Les premiers poèmes  qu'André compose sont datés d’août 1914 : la plupart sont remaniés plusieurs fois, avant la forme définitive.

Extrait du carnet de poèmes d'André


                                              
La poésie mais aussi  le dessin vont être ses compagnons d'évasion : avide de connaissances, il améliore sans cesse ses compétences.

Il va se construire une véritable bibliothèque de dessinateur : revues, périodiques, manuels, à l'image de " Cottages et constructions rurales" dont sont extraits ces croquis
.
Extrait de "Cottages et Cion Rurales"
Albin Michel Editeur
Extrait de "Cottages et Cion Rurales"
Albin Michel Editeur








.












Sa passion pour le dessin ne s’arrête pas au domaine de la construction. Il aime aussi le dessin d'art, l’aquarelle, le pastel.

Pour perfectionner son trait de crayon, il consulte de nombreuses parutions, telle "Le Modèle" dans lequel il va trouver des précieux conseils qui compléteront ses connaissances artistiques et qu'il appliquera méthodiquement pour que son art devienne presque "parfait".






















Dessin, lecture, poésie...mais quotidiennement la sinistre "réalité" des événements, même si la ville retrouve un calme précaire : "...le département de l'Yonne, et Sens en particulier, cessaient d'être dans la zone des armées... l'ennemi était suffisamment éloigné pour ne plus avoir à craindre des opérations militaires..." (source : à chacun sa guerre-G. Daguin-SAS/CEREP)

Correspondance adressée à Paul Jumeau, son père

..."Vous avez eu à Sens la chance d'être préservée de l'invasion. Vous ne saurez jamais votre chance car la situation a été épouvantable partout où ils sont passés..." (extrait retranscrit de cette correspondance)

Bien que la censure sur la presse soit maintenue, les horreurs de la guerre s'affichent aux yeux des sénonnais.

La bataille de la Marne a permis de sauver Paris. A quel prix..."...le nombre de blessés qui passent à Sens, en provenance des combats de la Marne dépasse les 40000 ! Les plus sérieusement touchés étaient hospitalisés. Ceux qui mouraient étaient enterrés avec les honneurs et leurs tombes fleuries régulièrement par des habitants unis, touchés par le sacrifice de ces inconnus. Une reconnaissance qui s'étendait à tout le canton..." (source : à chacun sa guerre:G.Daguin-SAS-CEREP)

Source : l'Illustration du 5 septembre 1914
Le terrible dessin de Lucien Jonas ne peut  "qu'exalter la patriotique fureur de nos combattants et les exciter à redoubler d'efforts pour libérer notre sol et pour le garder désormais inviolable" (l'Illustration du 31 octobre 1914)

L'intrus - dessin de Lucien Jonas

On est à l'entrée de l'hiver : on soigne les blessés, on enterre les morts, et on pense aux" vivants" , à tous ceux qui se battent : comme à l'image nationale, un élan de solidarité monopolise les femmes, les jeunes filles, les religieuses qui vont tricoter "...tricots, gilets de laine, chandails, chaussettes, cache-nez, gants de laine,furent remis au dépôt des régiments à la caserne Gémeau pour être distribués..." (source : à chacun sa guerre : G.Daguin/SAS/CEREP)

Le tricot du Combattant
Source : l'Illustration du 24 octobre 1914

Dans cette spirale infernale, pour André et sa famille, la fin de l'année 1914 voit aussi le départ proche de Pierre, l'aîné, comme tous les jeunes de la classe 15. 



(prochain article : début décembre 2014)
-Première correspondance de Pierre-



























mardi 14 octobre 2014

La vie d'André : août 1914 - octobre 1914

Août 1914 : André a 17 ans.




Le voici, photographié avec ses copains, en 1914. 

De gauche à droite : André Gréhant- Jean Bick-Henri Péraudeau (son meilleur ami)-
                                A. Grouillet - André à droite

Ce ne sont que des adolescents et pourtant, pour chacun d'entre eux, la gravité de la situation se lit sur leur visage. 

Ils ont conscience que le  monde est en train de basculer vers la guerre.







Fac- similé "Le Petit Parisien" du lundi 3 août 1914



(extrait de l'Histoire à la Une- librairie Tallandier)



 Le maire de Sens, Lucien Cornet, lance cet appel à la population : 






"Le premier jour de la mobilisation est le dimanche 2 août. Les réservistes doivent se tenir prêts à partir mais ils ne se mettront en route qu'après avoir pris connaissance des affiches de mobilisation qui vont être incessamment placardées. Monsieur le Maire invite la population à faire preuve du plus grand calme. Grâce à l'union et au sang froid de tous, la France saura faire face aux difficultés de l'heure présente..." (extrait de A chacun sa guerre-  G. Daguin- source CEREP- SAS).


"Le soir du 2 août et dans les 2 jours suivants d'autres mesures vont être prises : le maire rappelle que tous les hommes de la ville sont soumis aux obligations militaires...ce même 2 août, les trains chargés de centaines de réservistes arrivaient dans les gares de Sens..."(G. Daguin - source CEREP- SAS - A chacun sa guerre)

"Le 3 août commença la réquisition des chevaux et des voitures. Ce même jour, la France était déclarée en état de siège..." (G. Daguin- source CEREP-SAS- A chacun sa guerre).

Le 4 août le maire fait publier le communiqué suivant : " en raison des dispositions tendant à réglementer l'état de siège, nul ne peut voyager sur le territoire sans sauf-conduit. A cet effet, nuit et jour, des postes occupés par des sapeurs pompiers, fusils chargés et baïonnette au canon, arrêteront aux entrées de la ville les véhicules.. Cette manœuvre est la seule pratique pour dérouter les manœuvres des espions et empêcher les gens malintentionnés de se livrer à des attentats sur les ouvrages d'art, fils télégraphiques.

Sauf-conduit daté de 1916 identique certainement à ceux établis en 1914

L'enthousiasme de début août qui voit les troupes françaises entrer en Alsace et prendre Mulhouse s'estompe rapidement : la percée en Lorraine est un échec. L'armée française se replie derrière la Meuse.
La dure réalité est aux yeux de chaque sénonnais : malades ou blessés de guerre affluent dans les infirmeries installées ici et la, des évacués arrivent en nombre, les morts sont enterrés avec les honneurs...

Extrait de l'Illustration du 24 octobre 1914 

Cette scène ne se déroule pas à Sens (il s'agit ici d'une image de réfugiés de la banlieue d'Anvers) mais sans aucun doute André est-il quotidiennement confronté à des visions similaires, insoutenables pour l'adolescent qu'il est.

Il débute alors un "journal intime" et son âme tourmentée s'exprime au travers de ses écrits et ses poèmes.

Un extrait d'un poème intitulé "Souvenirs" témoigne de sa très grande sensibilité.

Extrait "Souvenirs" - Carnet de poèmes d'André


Malgré les événements tragiques, André perfectionne son art du dessin . Son manuel de référence reste "cours rationnel de dessin" par L. D'Henriet.







Le respect scrupuleux des règles

élémentaires de dessin de ce livre,

la multitude d'essais, de croquis, d'esquisses

vont parfaire l'habileté d'André dans cet art.


  


    Les conseils                                                   L'application pratique






Est ce un projet à réaliser, une copie de jardin, un rêve ? ...


La presse, même si la censure est présente, est le moyen de connaitre les événements. André la lit méthodiquement. Il conserve même certains de ses articles dans un petit classeur, telles ces photos :




Le présent est difficile, l'avenir incertain : la guerre ne devrait pas durer : c'est la rumeur. Cependant voilà ce qu'il écrit en octobre 1914 :

Extrait du journal intime d'André

Au travers de ces quelques lignes les thèmes récurrents du romantisme sont là : lyrisme, nostalgie, passion, solitude...


André est un romantique que les événements vont jeter dans l'enfer.





(Prochain article : début novembre 2014)











jeudi 9 octobre 2014

La ville d'André : SENS (Yonne) : 1900-1914



Façade septentrionale du transept : portail D’Abraham
Cathédrale (extrait éditions TEL)
Depuis le début du siècle, André vit à Sens (Yonne). au 35 rue Allix.
La rue d'André
Sens est une petite ville qui ne cesse de prospérer et de s'agrandir.
Régulièrement d'importants travaux sont exécutés pour améliorer l'hygiène (construction des égouts depuis 1888), développer la navigation et restreindre les effets des crues de la rivière, l'urbanisme ( nouvel hôtel de ville-marché couvert-théâtre...). Des écoles pour garçons et pour filles sont construites, un terrain de sports et de nombreuses associations voient le jour, dont une société archéologique .

Nul doute que les noms "rue du Cheval Rouge", "logis des célestins", "clos le roi", "rue de la république" , entre autres,...sont des endroits qu'André parcourt.

Le Pont d'Yonne
Eglise St Maurice
Entrée de la Grande Rue
Vue du Pont d'Yonne
                                                                                                                                                                         "...La vie s'y déroule calmement, dans un confort relativement aisé pour l'époque. N'a t-on pas un théâtre moderne, un récent marché couvert, des ponts larges et ouverts à la circulation, un nouvel hôtel de ville dont la flèche agace le ciel, et depuis quelques temps, d'agréables promenades et un square accueillant ? Des commerces prospères et des industries en nombre suffisant pour donner du travail à tous, tout en valorisant une agriculture variée et une culture maraîchère qui fait le bonheur des clients du lundi ,..." (extrait de "A chacun sa guerre- Sens 1914-1918- G. Daguin/SAS/CEREP)

Quai Landry

Il est facile de s'imaginer André se promenant le long de la rivière ou courant dans la jolie rue du Tambour d'Argent,

Rue du Tambour d'Argent

de faire une grande balade avec ses parents dans les proches environs


Carte postale de la collection familiale -

ou d'aller boire une collation à la terrasse de cet hôtel restaurant.


Hôtel de Paris et de la Poste vers 1900
Source : histoire-sens-senonais-yonne.com
Nul doute qu'André a arpenté de nombreuses fois les rues de Sens envahies par les eaux lors de la crue de 1910.

Source : histoire-sens-senonais-yonne.com

Source histoire-sens-senonais-yonne.com

C'est dans cet établissement scolaire que l'avenir d'André se joue : il a toujours eu beaucoup de respect et de reconnaissance pour les principes d'éducation et la formation qu'il a reçus durant toutes ces années de scolarité.







 






A l'image de cette paisible rue des Cordeliers,


et à l'aube du premier conflit mondial,









Sens est une "ville en paix qui ne voulait pas la guerre" 

(A chacun sa guerre - G. Daguin - source CEREP-SAS)






(prochain article : mi octobre 2014)